Recension : Une nouvelle édition de la liturgie de saint Jean Chrysostome par l’archiprêtre André Fortounatto
novembre 04, 2012Jean-Claude Larchet
« Sainte
et divine liturgie de notre père parmi les saints Jean Chrysostome,
archevêque de Constantinople », éditée avec les rubriques et annotée par
l’archiprêtre André Fortounatto, préface de S. E. l’archevêque Gabriel
de Comane, édition de l’Union directrice des associations orthodoxes
russes, 12 rue Daru, Paris, 2011, 163 pages en deux volumes. L’archiprêtre André Fortounatto
propose, dans une très belle présentation en deux volumes, une nouvelle
édition du texte de la liturgie de saint Jean Chrystostome.
La traduction reprend celle de la « Fraternité orthodoxe » bénie par
l’Assemblée des évêques orthodoxes de France, en lui apportant quelques
modifications tenant compte de l’usage propre à l’Archevêché des églises
orthodoxes russes en Europe occidentale (rue Daru) car, explique Mgr
Gabriel dans sa préface, si « l’édition faite par la Fraternité bénie
par l’A.E.O.F. s’adresse à l’ensemble des orthodoxes en France et dans
les pays francophones, soit roumain, grec ou russe, ce qui est tout à
fait légitime, (…) une telle superposition de traditions ne simplifie
pas la tâche des membres du clergé lors des célébrations ». Cette
remarque vaut aussi et surtout pour les rubriques qui accompagnent le
texte.
Ce sont ces rubriques qui constituent l’intérêt principal de cette
édition : rudimentaires dans les précédentes éditions de la liturgie en
français, elles sont ici très détaillées et, peut-on dire, complètes,
bénéficiant en outre, dans un second volume, de notes qui apportent des
précisions supplémentaires, des éclairages ou encore des solutions à des
cas particuliers que présente le typikon, notamment lors de certaines
fêtes (p. 185-123). À ces notes s’ajoutent des commentaires concernant
des situations spéciales que peut rencontrer le prêtre (cas d’altération
du pain ou du vin avant la consécration, présence d’un corps étranger
après celle-ci, façon de préparer et de conserver les saints dons
destinés aux malades…) (p. 124-126), et les rubriques propres aux
concélébrations sans évêque et avec un évêque (p. 127-151).
Avant de proposer un petit lexique qui termine le second volume
l’auteur, dans une postface, explique qu’il a commencé à servir au
sanctuaire à l’âge de cinq ans en 1945, et que ce travail est donc le
fruit d’une expérience ecclésiale personnelle de près de soixante-dix
ans.
Comme l'indiquent le préfacier et
l'auteur, cette édition s’adresse au clergé de l’Archevêché des églises
orthodoxes russes en Europe occidentale, dont elle reflète l'esprit et
les usages particuliers (y compris quelques réformes apparues au cours
des dernières décennies du XXe siècle). Cependant les prêtres et les
diacres, mais aussi les sous-diacres, lecteurs et céroféraires des
autres juridictions y trouveront aussi – moyennant quelques corrections
pour adapter certaines rubriques aux pratiques de leur propre Église –,
un instrument précieux, dont il n’existait pas jusqu’à présent
l’équivalent en langue française. Tous les fidèles pourront aussi le
lire avec profit pour mieux comprendre, dans tous ses détails, le
déroulement de la liturgie et le sens de certains de ses rites. On doit
donc remercier le père André Fortounatto pour ce travail fort utile.
Les deux volumes sont vendus ensemble, pour un prix modique, à la librairie Saint-Serge. Jean-Claude Larchet.
Voici reproduit ici - dans son intégrité - un extrait d'un message que l'on peut lire sur un blog catholique traditionaliste. Ce message ne peut laisser indifférent à plusieurs titres qui seront exposés après la citation...
« Éminences, Excellences, Messeigneurs, [...] Jeune cérémoniaire pontifical, j’ai vu avec effarement, à l’heure des débats conciliaires, les responsables de l’Eglise de France mener vers le naufrage le navire dont ils avaient la charge. J’ai ainsi entendu un père provincial jésuite énoncer doctement « Il faut désacraliser l’Eglise ! » (sic !) Et "ils" y sont parvenu à Rome : le concile a supprimé le sens du mystère, le sens du sacré, l’universalité ecclésiale par la disparition du rituel et du latin, la banalisation par la disparition du formalisme éclaté dans une florescence d’initiatives dites novatrices. Il a permis des fractures en autorisant la multiplication des traductions hasardeuses, et surtout, il a introduit le doute légitime en admettant la "liberté religieuse" qui s’oppose par nature au prosélytisme et l’apostolat missionnaire !
Divisée dans ses rites et dans ses langues, l’Eglise n’est plus "une". Quelle force avait-elle lorsque tout chrétien, de New York à Pékin, pouvait assister à la messe avec son missel habituel et en partager le mystère avec une assistance inconnue dont il ne partageait pas même la langue ! Là l’idée de communion avait tout son sens : le partage du sacrifice de tous, entre tous, réunis ensemble par et pour l’Evangile, par delà les différences linguistiques, géographiques et civilisationnelles, unis dans une même foi…
Travaillant en Afrique Noire dans les années 80, j’ai noté là avec surprise l’importante proportion des traditionalistes africains. Un de mes amis, alors ministre, m’en expliqua un jour la raison – ce qui aurait laissé rêveur n’importe quel prélat du concile : « Ils sont fous à Rome ! Les gens ici ne comprennent plus rien : avant on avait une langue pour la prière, une langue sacrée qui ne servait pas pour tous les jours, une langue faite pour ne s’adresser qu’à Dieu, et c’était la même langue pour nous tous. Ils ne savent pas, à Rome, que dans ce pays nous comptons quarante ethnies ? Alors quand tu te déplaces de quarante kilomètres un dimanche dans un village voisin, tu ne comprends plus rien à la messe ! Et on ne peut plus prier avec un prêtre de la tribu d’a côté. C’est les fétichistes qui rigolent bien : eux ils gardent la langue des fétiches ! »(sic !) Mais nos pères conciliaires se sont obstiné : il fallait en revenir « aux fondations » de l’Eglise !
L’ennui c’est que lorsqu’on fait table rase, il faut reconstruire dessus : c’est précisément le rôle des fondations que de prévoir d’y asseoir quelque chose ! [...] »
Ce texte en son entier est particulièrement émouvant parce qu'il exprime le désarroi d'un fidèle et sincère serviteur d'une
Église en perdition.
À de nombreuses reprises il a été question dans ce blog, des périls qu'il y aurait à trop se rapprocher d'un corps malade sans prendre les précautions sanitaires propres à une saine ecclésiologie et une saine théologie, ce n'est donc pas dans ce sens qu'ira le commentaire de ce texte.
Ce qui nous importera ici c'est le problème de la langue liturgique.
Et là il faut bien remettre en question le principe défendu par les représentants d'une Église orthodoxe locale en le confrontant à la réalité du terrain. L'exemple de l'Afrique Noire cité par l'auteur ci-dessus est tout de même incontournable.
Faut-il traduire non seulement tous les textes sacrés de la tradition chrétienne mais également tous les offices dans les langues du monde entier ? Si oui alors ne serait-il pas de l'ordre du péché de laisser des populations entières du globe à l'écart de la Bonne Nouvelle aussi petits soient les groupes qui la composent ? N'y a-t-il pas là une forme d'égoïsme ? Car au nom de quel principe (impérialiste ?) imposerait-on à un peuple la langue d'un autre - dont il est peut-être en outre l’adversaire multiséculaire bien que tout proche voisin ?
Cependant, comme le suggère l'auteur, "la multiplication des traductions hasardeuses" n'est-elle pas un problème grave ? N'est-il pas légitime de penser qu'il serait préférable de "partager le mystère avec une assistance inconnue dont [on ne partage] pas même la langue ! Là l’idée de communion [a] tout son sens : le partage du sacrifice de tous, entre tous, réunis ensemble par et pour l’Évangile, par delà les différences linguistiques, géographiques et civilisationnelles, unis dans une même foi."
Célébrer
dans une langue liturgique, qui n'est plus parlée dans sa forme
ancienne et donc appartenant à tous, commune à une région la plus vaste
possible, semble bien offrir pas mal de bénéfices du point vue de la
mission elle-même paradoxalement. Utiliser une telle langue avec un
rituel commun au plus grand nombre (appartenant à un passé recevable par
le plus grand nombre également car bien souvent oubliée par le peuple
qui pourrait s'en revendiquer par ses origines) sans oublier d'avoir en même temps des traductions commentées et catéchétiques indispensables
pour la mission dans un maximum de langues locales, ne serait-ce pas
préférable ? Ne pourrait-on dissocier la célébration de la catéchèse. La
transmission de la foi chrétienne a-t-elle pu se passer de traductions,
d'interprétations, de commentaires ? Certes non. Les Juifs avaient
d'ailleurs donné l'exemple.
Mais
la célébration n'a-t-elle pas toujours été un moment en un lieu où
l'injonction première pour le peuple - de la communauté du moins - était
d'oublier tout souci du monde". N'y a t-il pas dans la liturgie,
même si l'une ne va pas sans l'autre, deux parties : l'une plus
catéchétique et l'autre plus orante durant laquelle il n'y a plus lieu
de com-prendre avec sa raison raisonnante qui a besoin de saisir tous
les mots mais plutôt d'accueillir avec l'humilité des "pauvres en
esprit" en "lâchant prise"... Qui pourrait prétendre tout avoir entendu
et compris des paroles chantées en langue locale de la psalmodie
ecclésiale ?
Mais il y une autre partie de la réalité que l'on ne peut ignorer sans une forme d'hypocrisie.
On
nous dit : dans l'Orthodoxie il n' y a pas de langue sacrée ! Ce qui
la distinguerait entre autres de l'Église latine traditionnelle...
Vraiment ?
-
Pourtant les peuples slavophones ont un mal fou à se séparer du slavon
d'église et à le remplacer par le russe contemporain par exemple. Même
si on n'invoque pas le caractère sacré de la langue, il n'empêche,
quand il s'agit de chanter et de psalmodier en église, nombreux - et
peut-être même majoritaires - sont ceux qui préfèrent conserver le
slavon sous toutes sortes de prétextes : adéquation parfaite des
mélodies et de la langue, sens des mots immuables, importance de la
tradition etc.
Il
n'en va pas d'ailleurs très différemment dans les paroisses
francophones de tradition slave, bien souvent le chantre fait la grimace
en apparté quand il doit chanter en français des mélodies slavonnes.
Même s'il y met toute sa bonne volonté, il ne pourra dans le privé
s'empêcher de préférer le chant slavon en slavon.
-
Pourtant les peuples hellénophones conservent la même langue liturgique
depuis des siècles et même si les clercs ont chez eux des dictionnaires
de grec ancien et des textes en version bilingue (grec ancien et grec
moderne) ils persistent à célébrer en grec liturgique antique. Et toute
l'hymnologie et qui plus est les Saintes Écritures ne sont ni lues ni
psalmodiées en grec contemporain.
Il
n'est pas inutile de dire non plus que les versions françaises du chant
byzantin, même si elles font l'objet de dévoués musiciens, clercs et
laïcs, qui travaillent avec courage et détermination, n'en demeurent pas
très faciles à composer et à interpréter, ce qui est assez logique
puisque ces mélodies ont été composées pour le grec à l'origine. Même si
les roumains, les serbes et les arabes entre autres peuples ont réussi -
après tout de même des siècles d'acculturation et de pratique
liturgique - à marier efficacement musique byzantine et langue locale.
De
même ont été conservés l'araméen (le syriaque) le copte et l'hébreu
liturgique ... Il n'en est pas autrement dans d'autres religions
d'ailleurs : tous les bouddhismes, l’hindouisme etc. ont perpétué pour
leurs offices une langue figée dans le temps qui est devenue une langue
"sacrée" par la suite.
Prétendre donc que les défenseurs du latin seraient les seuls à se crisper sur le passé ce
serait ignorance ou pur mensonge. Il semble bien plutôt que ce soit un
besoin humain vital de conserver et d'utiliser "une langue sacrée qui ne
sert pas pour tous les jours, une langue faite pour ne s’adresser qu’à
Dieu".
Alors
pourquoi ne pas avoir conservé le latin comme langue liturgique ( non
seulement pour la liturgie latine (des versions bilingues
français-latin existaient depuis bien longtemps) mais également pour
célébrer les offices orthodoxes "byzantins" (à côté des traductions
diverses en français) avec la musique sacrée locale adaptée qui était
pratiquée naguère encore (sans doute jusqu'au XIX°s dans une expression
encore assez proche de la tradition authentique dans les campagnes du
moins) c'est à dire toutes les formes du chant liturgique traditionnel
"occidental" dit "grégorien" qui, même sous ses formes contemporaines
coupées de la tradition, demeure encore indubitablement porteur du
sacré? D'ailleurs il existe une version latine assez ancienne de la Divine Liturgie de St Jean Chrysostome.
Il n'est pas dit que cela n'eût pas produit des fruits de mission
en quantité et de qualité appréciables, particulièrement dans le
contexte du siècle passé. Peut-être même eut-il mieux valu que les
traditionalistes catholiques, fidèles à leur culture latine,
redeviennent orthodoxes quitte à être "schismatiques" aux yeux de Rome,
de toute façon...
Qui
pourrait donc nier que l'unité soit favorisée par la quasi unicité - du
moins dans une région donnée du globe - d'une forme liturgique et d'une
langue liturgique uniques. L'exemple africain est tout de même frappant
et incontournable, et donne tout de même matière à réfléchir
sérieusement à la question. Dieu seul sait...
Bien
sûr on me citera les liturgies occidentales "revival" - pardonnez
l'irrévérence - "des Gaules", bénéventines, ancienne romaine,
mozarabes, de Sarum etc.... mais d'abord ce que j'en vois sur des
photos ou vidéos me laissent une fâcheuse impression de "sobriété"
confinant à la pauvreté, plutôt "cheap" enfin pour le dire un peu brutalement, comparé aux liturgies catholiques romaines "tradi" - qui ont tout de même de la tenue - avec
de rares extraits de chant qui ne correspondent que rarement à ce qu'on
voit... mais ce n'est peut-être pas le plus grave, car ce que l'on
entend parfois dans les paroisses orthodoxes estampillées n'est pas
toujours bien folichon musicalement s'entend... Cependant
ce qui est le plus problématique, à mon humble avis, c'est la confusion
qui peut s'en suivre d'une pratique liturgique par trop différente par
rapport à ce qui est devenu quasiment l'universal orthodoxe c'est à dire
les offices byzantins - tellement riches et reconnus par n'importe quel
orthodoxe de n’importe quel pays, ce qui est au moins aussi important,
si ce n'est plus, que la langue liturgique. Cette confusion que l'on
pourrait faire entre liturgies catholique et orthodoxe, on semble
d'ailleurs vouloir y remédier mais en ajoutant encore davantage de
confusion quand on voit des vêtements liturgiques byzantins de clercs au
milieu des "occidentaux" : alors là on risque de plonger le fidèle
orthodoxe de passage, venu par hasard dans une telle paroisse, dans une
plus grande confusion encore. En effet il pourrait aussi bien se
demander s'il n'a pas affaire là à des uniates. Pas très édifiant ni
très efficace au point de vue missionnaire si je peux me permettre.
Dieu seul sait... mais j'ai moi-même bien peur de savoir également quelque chose : cet article ne rencontrera que peu d'adhésion
c'est clair, car du côté traditionnel catholique, mon message ne peut
être que celui d'un schismatique appelé à rentrer au bercail romain, du
côté catholique moderniste cela ne suscitera qu'étonnement, indignation
anti-traditionnaliste et rejet de ce qui est considéré comme
irrémédiablement passé, du côté orthodoxe 'classique' cela ne
provoquera que rejet car le latin est trop marqué catholique, du côté orthodoxe partisan d'une certaine fidélité aux sources - bien que moderniste en réalité - cela
sera considéré comme non conforme à la nécessité de la langue locale
comprise par tous pour l’Évangélisation et l'édification de l’Église
locale (bof ! on a vu plus haut ce qu'il en était en réalité et en outre
beaucoup de ceux qui ont cette opinion n'attendent que le rapprochement
avant l'union avec Rome qu'ils considèrent déjà depuis longtemps comme
la véritable Église
locale), quant à tous ceux qui ont choisi par commodité (?), par
facilité (?) par souci de leur descendance (?) le chant franco-russe,
également partisans de l’Église locale-locale (mais pas tout à fait
pourtant puisque favorisant la tradition "russe") ils n'ont pas fait
tout ce travail d'adaptation des mélodies slavonnes au français depuis
des années pour rien ! alors....
C'était juste pour faire une suggestion quoi ! Un geste gratuit c'est permis non ? Dieu reconnaître les siens sans doute...
Extrait de la Divine Liturgie pour la fête du transfert des reliques de saint Grégoire Palamas le 1er mai 2009, à la chapelle de l'Université "Politehnica" de Bucarest.par le Choeur Nectarie Protopsaltul
Le Forum national des Musiciens de l’Eglise Grec orthodoxe (National Forum of Greek Orthodox Church Musicians) annonce une nouvelle ressource pour la formation de chantre: «La notation, de transcription, le rendu du chant byzantin: Un manuel de formation pour le chantre orthodoxe oriental» par le Dr Frank Desby. La publication a été éditée par le Dr George Stefanidakis et est publié à titre posthume par le Forum national.
La ressource comprend un manuel de 345 pages plus un CD avec un fichier PDF téléchargeable du texte et des exemples musicaux des exercices.
Le Manuel du Chantre est disponible en trois formats: livre à couverture rigide avec CD, classeur avec CD, et CD seulement.
En cliquant directement sur la rubrique 6. dans la colonne à gauche en haut du blog, vous aurez un accès immédiat à tous les documents que Fédon met à notre disposition.
Finalement vous trouverez aussi les textes des hymnes des offices. Après avoir hésité sur le choix d'une version parmi toutes les traductions connues en français, sachant malgré tout que nulle version ne pourra satisfaire tout le monde, il a été décidé que les textes en français figureraient aussi sur les fichiers. Il s'agit d'une version de qualité dont les exigences de proximité par rapport au texte d'origine comme de correction de la langue devrait convenir à beaucoup cependant. Puisse le plus grand nombre en faire usage. Fédon a même rajouté une icône de chaque fête... JUSQU'AU 2 JUIN INCLUS !
Pour ceux qui voudraient recevoir directement le typikon inscrivez-vous au Google group dont voici l'adresse
A partir du 6 mai, notre frère Fedon Nicolaou (auquel vous pouvez envoyer un message en cliquant sur son nom) va assurer un service très précieux pour l'Église orthodoxe francophone : Il va traduire, du grec en français, le typikon (l'ordo) concernant les offices et la Divine Liturgie de chaque semaine.
En effet nous n'avions que peu de paroisses qui donnaient le typikon en français sur leur site et souvent de manière soit irrégulière soit incomplète. On pourra désormais lire en français un typikon conçu à partir de celui du Patriarcat de Constantinople et de l'Église de Chypre. Cela signifie évidemment que le calendrier suivi est le Julien 'réformé'.
Les textes - dont les traductions peuvent être différentes selon les besoins et les choix - ne seront pas donnés de sorte que chacun puisse privilégier telle ou telle traduction.
Que Notre Seigneur le bénisse et lui donne le courage et la persévérance !
D’un point de vue musical c’est une belle réalisation. Une adaptation d’une mélodie byzantine de l’hymne des Chérubins du mode 8 (plagal ton4) arrangée pour chœur polyphonique a capella magnifiquement chantée par d’excellents chanteurs. L’arrangement et l’interprétation sonnent tellement ‘occidental’ qu’on peine à reconnaître la mélodie byzantine ; elle est parfaitement « occidentalisée ». On pourrait penser que cela a été composé entièrement à l’ouest. Il y a d’évidence un choix esthétique, un parti pris d’occidentalisation techniquement réussi.
D’un point de vue de la tradition du chant orthodoxe byzantin cela peut être vu évidemment comme une altération, une dénaturation. Traditionnellement en effet les pays qui ont choisi de perpétuer le chant byzantin l’ont adapté à la langue locale certes mais en ont conservé les principes et les techniques de composition, les caractéristiques et les ornements traditionnels, chant monodique avec isson, voire la transcription en neumes byzantins qui permettent de les reconnaître instantanément. Ici ce n’est pas du tout le cas.
Alors d’aucuns pourront penser que, vu le degré d’occidentalisation de cette mélodie byzantine originelle, non seulement on perd la tradition et la spécificité esthétique orthodoxe mais qu’en outre donc on finira par perdre, si ce n’est déjà fait, l’orthodoxie théologique voire qu’on est en route directe pour l’hétérodoxie.
Pourtant, cela impose une réflexion un peu plus approfondie sur une problématique urgente, malgré les apparences offertes à un regard extérieur, qui se pose dans toute l’Orthodoxie occidentale, qu’elle provienne de la descendance émigrée des peuples orthodoxes d’origine ( grecs, albanais, roumains , bulgares, serbes, russes, arabes etc.) qui est désormais largement et profondément « occidentalisée » culturellement et ceci particulièrement en milieu anglophone – ou qu’elle soit d’origine directement « occidentale ».
Des efforts admirables et un travail incroyable – vu l’immensité de la tâche – se font ici et là, mais de façon isolée trop souvent et peu concertée – chaque école défendant farouchement son point de vue sur la tradition sans toujours se préoccuper des besoins urgents de l’Eglise – et avec un minimum de partage, et ceci particulièrement en Europe… car aux USA la mentalité américaine est de perdre le moins de temps possible, d’être efficace avant tout pour répondre aux besoins, et résoudre ce qui doit rester problématique le moins de temps possible ; on travaille beaucoup, on expérimente et on met en application avec les moyens techniques, pédagogiques, communicationnels et financiers adéquats pour un développement et une propagation rapides. Chez nous en Europe c’est plus laborieux comme d’habitude… Il n’empêche, les besoins des paroisses et même des monastères sont difficilement pourvus et chacun et chacune se débrouille dans son coin comme il peut en puisant à diverses sources, en assurant correctement l’essentiel et en « bricolant » en attendant mieux pour le reste. Pourtant le développement de l’Orthodoxie est très important en Europe de l’ouest proportionnellement à la population et au territoire.
Alors en Amérique, ce n’est pas forcément « Hollywood » dans les églises comme le disait J.F. Colosimo, il ne faut pas caricaturer hâtivement, car des choix « audacieux » mais sans doute légitimes du point de vue de l’Evangélisation et de la fourniture du nécessaire , non seulement pour la mission mais pour le nécessaire quotidien des communautés orthodoxes existant déjà, sont faits et mis en application avec la meilleure qualité possible, ce qui n’est pas critiquable.
Ce choix esthétique donc est défendable. Après tout, ce genre de polyphonie sonne plutôt plus antique que tout un chant religieux russe polyphonique, très beau musicalement, de facture indéniablement occidentale (i.e italo-allemande essentiellement) malgré l’origine russe et donc pas spécialement de tradition esthétique orthodoxe antique.
Parallèlement existe tout un travail réussi d’adaptation du chant byzantin à la langue anglaise qui respecte davantage la tradition, que ce soit en Amérique, en Angleterre comme au Moyen Orient !
En Amérique tout semble exister : le chant byzantin hellénophone traditionnel – avec ses différentes écoles –, le chant byzantin traditionnel anglophone, le chant byzantin anglophone harmonisé à plusieurs voix dans le style russe, et même le chant byzantin anglophone harmonisé à plusieurs voix avec orgue qui le fait ressembler comme deux gouttes d’eau à du chant catholique, le chant russe traditionnel adapté à l’anglais, le chant antique znamenny adapté à l’anglais et les réalisations sont toutes de grande qualité technique ! Certaines églises comme l’Antiochienne en Amérique mélange même les différents styles…
Alors que faut-il choisir ? Peut-être que tout ce qui a été fait correspond aux différents besoins et que chacun de ses besoins a sa légitimité ?
On ne peut s’empêcher d’avoir à l’esprit qu’il y a eu des chants liturgiques chrétiens en Europe de l’Ouest – comme en Russie d’ailleurs, avec les chants zanmenny – qui ont sans doute été les meilleures acculturations régionales du chant grec d’origine, comme le chant syriaque antique a sans doute été à l’origine du chant byzantin. De nombreuses reconstitutions ont été enregistrées depuis quelques décennies qui ont fait connaître tous ces trésors antiques.
Tout un travail de recherche, de formation et de réalisation selon diverses optiques d’école a été fait pour en retrouver la tradition interrompue mais la pratique liturgique qui s’en est suivie est demeurée à la marge du chant catholique contemporain malgré les encouragements du Pape actuel.
Il faut aussi savoir qu’une tradition liturgique sonnant « occidental », celle de Sarum, a été mieux conservée que ce qu’on appelait naguère le « grégorien » et a même été reçue comme orthodoxe par l’ERHF et même si elle est encore plus minoritaire que le « Chant antique des Gaules « (comme l’a appelé le musicologue Iegor Reznikoff) en milieu orthodoxe qu’elle ne l’est en milieu catholique.
Bien difficile de conclure. Tout existe donc. Et chaque mode d’expression trouve ses amateurs, ses adeptes et ses pratiquants. Doit-on souhaiter une plus grande harmonisation mais doit-on aller jusqu’à l’uniformisation ? – Certainement non. En réalité, dans tous les cas l’hymnologie orthodoxe est suffisamment complexe pour qu’en fin de compte, chaque paroisse et monastère fasse son choix en fonction des possibilités et des compétences musicales de ses membres pour assurer le mieux possible, selon le contexte, le déroulement plus ou moins intégral des offices et ce n’est pas de moindre importance.